Droit, propriété, propriété intellectuelle

Immobilier US : Retour sur le nouveau scandale qui ternit l’image des banques américaines

 Immobilier US : Retour sur le nouveau scandale qui ternit l’image des banques américaines

 Plus d’un million de familles américaines risquent de se retrouver à la rue cette année. Les établissements bancaires sont aujourd’hui accusés d’avoir bâclé les procédures de séquestre, qui pourraient être contestées

Une machine infernale: ces trois derniers mois, 288 345 maisons ont été saisies aux Etats-Unis, le nombre le plus haut depuis l’éclatement de la bulle immobilière, en 2006. A ce rythme, on s’attend à ce que 1,2 million de familles américaines supplémentaires se retrouvent à la rue pendant l’année 2010. Pourtant, cette machine pourrait être arrêtée. Depuis quelques semaines, ce qui prend l’allure d’un nouveau scandale lié aux «subprime» acquiert des dimensions de plus en plus vastes, après que cette pratique a déjà été à l’origine de la récente crise financière.

L’origine du scandale?

PLUS/MOINS DE VICE DE PROCEDURE EN SUIVANT :

 De simples signatures qui ne collaient pas, au bas des documents des banques qui annonçaient aux propriétaires l’engagement de poursuites pour saisir leur maison. Signée par de fausses personnes, voire par des moyens automatisés, avec la confirmation de notaires qui, de toute évidence, n’avaient pas lu les dossiers, ou n’existaient pas. Ces pratiques étaient particulièrement répandues au sein des grands établissements de prêts hypothécaire, Bank of America, Ally Bank et JP Morgan. Elles mettent en évidence le manque de considération dont faisaient preuve les banques à l’égard de leurs clients, qui allaient être expulsés de leur maison sans qu’il soit prêté la moindre attention à leur dossier ou que soient étudiés les moyens d’éviter cette décision. Dans la presse américaine, Michael Heid, un responsable de Wells Fargo, semblait mettre en avant des raisons pratiques pour expliquer ces méthodes: engager 10 000 employés supplémentaires pour traiter correctement ces dossiers de saisies, justifiait-il, «représente un investissement substantiel en temps et en argent, ajouté à l’achat d’ordinateurs, aux cours de formation, et à tous les changements de système que cela aurait impliqués». En un mot, c’est à la chaîne que les maisons ont été saisies. Et ce malgré les efforts entrepris par l’administration de Barack Obama afin «d’humaniser» le processus.

Demande d’un moratoire

Mais cette manière de faire est aussi illégale. Dans les 50 Etats américains, les procureurs généraux ont décidé de lancer des enquêtes qui pourraient se traduire en autant de révisions de dizaines de milliers de cas de saisies douteuses. Les banques – qui toutes ont promis de stopper ce genre d’agissements – risquent en outre des plaintes pénales qui pourraient leur coûter cher.

Au sein du Parti démocrate, certains ont réclamé un moratoire pur et simple sur toutes les procédures de saisie en cours. Une per­spective que refuse toutefois ­d’envisager pour l’instant l’administration Obama, tant elle craint que cette action n’envenime encore le marché de l’immobilier.

Pourtant, ce n’est pas encore là la fin du scandale.

 Car, si les banques ont mis si peu de soin à vérifier certains de ces millions de dossiers, c’est éventuellement pour une autre raison: elles ne les ont peut-être jamais possédés. Alors que ces prêts hypothécaires ont été intégrés et disséminés dans des produits financiers complexes, ce nouvel épisode met en lumière une pratique qui, apparaît-il aujourd’hui, était monnaie courante à Wall Street pendant près d’une décennie: ces prêts hypothécaires ont été vendus par millions aux grandes banques sans que les documents physiques qui prouvaient ces acquisitions aient suivi.

Vaste compensation

Selon certains analystes, ces révélations pourraient être une aubaine pour les fonds de pension ou autres grands investisseurs qui ont perdu des milliards lors de la crise financière et pourraient se retourner contre les banques pour exiger de vastes compensations, voire pour démontrer le caractère illégal de leurs produits financiers, fondés sur les prêts immobiliers dont ils n’étaient pas propriétaires.

Peignant le diable sur la muraille, certains responsables de banque voient s’approcher des plaintes collectives qui pourraient les plonger dans des années de procédures légales et leur coûter extrêmement cher. Et tout cela à trois semaines des prochaines élections…De nombreux avocats ont d’ores et déjà déposé des plaintes en nom collectif pour le compte de propriétaires immobiliers dont le logement aurait été saisi indûment.

La crise des saisies immobilières US: un scénario catastrophe?

Si  le gel de centaines de milliers de saisies immobilières aux Etats-Unis pourrait coûter cher aux banques,il a peu de chances de menacer l’ensemble du système financier comme l’avait fait la faillite de Lehman Brothers fin 2008. 

Le Washington Post citait jeudi un analyste de la maison de recherche Graham-Fisher, Josh Rosner, selon lequel un moratoire total sur les saisies « pourrait provoquer la même situation qu’en 2008 », allusion à la faillite de la banque Lehman Brothers qui avait plongé le système financier dans la tourmente.Mais la plupart des analystes ne croient pas à un scénario catastrophe.

« Le pire serait que de nombreuses erreurs de procédure soient découvertes, que les 50 Etats demandent un gel de toutes les saisies qui durerait pendant des mois avec des poursuites de plus en plus importantes », indique Erik Oja, analyste de l’agence de notation Standard and Poor’s. Il juge néanmoins cette hypothèse peu probable. Pour lui, « l’affaire sera gérable », même si elle imposera aux banques des dépenses d’avocats et le paiement d’amendes, ainsi que des provisions pour défauts de prêts et des capitaux propres renforcés. 

Lors de la présentation des résultats trimestriels de leur banque mercredi, les dirigeants de JPMorgan Chase, qui a suspendu quelque 115.000 saisies, ont indiqué consacrer des « ressources substantielles » à la vérification de ces dossiers et assuré qu’il ne leur faudrait que quelques semaines pour terminer. Ils ont également affirmé que leurs dossiers de saisies étaient corrects.

A plus long terme, certains craignent que la profitabilité des banques ne soit réduite à néant lorsqu’elles rachèteront des milliards de dollars de prêts immobiliers détenus par des investisseurs qui ont acquis des titres adossés à des créances immobilières (MBS). 

Bank of America, numéro un des crédits immobiliers aux USA, pourrait ainsi se voir obligée de racheter jusqu’à 74 milliards de dollars de prêts, selon une estimation de Branch Hill Capital. 

Il n’y a pas d’inquiétudes sur les résultats des banques, mais sur l’étendue des coûts qui seront nécessaires pour régler cette histoire» a commenté Art Hogan, analyste de Jefferies, qui rapporte que le marché évalue à «100 à 250 milliards de dollars le coût pour toutes les banques».Richard Bove, analyste chez Rochdale Securities, évalue les pertes possibles du secteur à 81,9 milliards de dollars pour les banques. 

La Sifma, association américaine de la finance, s’est alarmée d’un éventuel moratoire généralisé des saisies, qui serait selon elle «catastrophique».

L’autorité de régulation du marché du financement du logement a appelé à reprendre «sans délai» les saisies ne présentant pas de problèmes.Elle juge que ces difficultés ne devraient pas s’étendre aux banques plus petites, «qui n’ont probablement pas été confrontées au problème des signatures automatiques» de dossiers.

Le marché s’interroge aussi sur la pratique des « signataires robot » et sur le retour de bâton qu’elle pourrait impliquer pour les banques.Le Financial Times, citant une déposition faite au tribunal, écrit ainsi qu’une employée de Wells Fargo signait jusqu’à 500 documents de saisie par jour. Cette employée, au nom de Xee Moura, signait les documents au nom de Wells Fargo et se contentait de vérifier que son nom et son titre apparaissaient correctement, poursuit le quotidien financier. Le New York Times rapporte quant à lui que le traitement des dossiers de Citigroup et de GMAC avait été délocalisé à Guam et aux Philippines et que très nombreux documents finissaient directement à la poubelle.

L’enquête ouverte par les procureurs généraux tente notamment de déterminer si certaines banques ont fait preuve de négligence dans l’examen de tels documents ou si elles ont fait de fausses déclarations pour chasser les mauvais payeurs de leur domicile.

 source agences/le temps oct10 

ET TOUJOURS : La firme spécialisée RealtyTrac a chiffré à plus de 288.000 les logements saisis aux États-Unis durant le 3ème trimestre calendaire, après 270.000 au second trimestre. Il s’agit d’un record de saisies depuis 2005. Ces saisies ont concerné 102.134 logements, dépassant pour la première fois la barre des 100.000 reprises de possession mensuelles par des créanciers, indique RealtyTrac, qui publie son enquête mensuelle depuis janvier 2005. Le record précédent ne datait que du mois d’août. Les saisies ont également atteint un record sur l’ensemble du troisième trimestre, où elles ont augmenté de 7% par rapport au trimestre précédent, et de 22% en glissement annuel. RealtyTrac table qu’elles baisseront «au quatrième trimestre dans la mesure ou plusieurs prêteurs de premier plan ont cessé dans certains Etats les ventes aux enchères de logements dont les propriétaires font défaut sur leur emprunt».

Rick Sharga, vice president de la firme, constate que des difficultés légales vont poindre après l’investigation commune décidée  par des responsables de 50 Etats américains et le District of Columbia. Pourtant, malgré ces enquêtes et le gel de nombreuses saisies, le dirigeant de RealtyTrac juge que peu d’actions légales porteront leurs fruits. Sharga estime donc que les saisies reprendront et évalue à un million le nombre de logements qui seront saisis cette année. Pour l’heure, les banques américaines ont saisi 816.000 logements cette année.

EN COMPLEMENT : Immobilier US : Banksters version subprime / la polémique sur les procédures de saisies enfle aux Etats-Unis

EN LIEN Le fondateur et ancien PDG du prêteur hypothécaire Countrywide, Angelo Mozilo, a accepté vendredi de verser un total 67,5 millions de dollars, pour échapper aux poursuites lancées par les autorités et des actionnaires, ont annoncé les autorités

Dans un communiqué, le gendarme de la Bourse, la SEC, a expliqué que M. Mozilo, dont l’établissement californien fut un temps le premier prêteur hypothécaire du pays, allait lui verser une amende record (pour un particulier) de 22,5 millions de dollars. Il accepte en outre de restituer 45 millions de dollars qui iront dédommager les investisseurs

«L’amende record contre Mozilo est l’issue qui convient pour un cadre dirigeant qui a délibérément trahi ses devoirs envers les investisseurs en dissimulant ce qu’il voyait: un désastre en train d’arriver dans lequel Countrywide cédait sous le poids de prêts hypothécaires de plus en plus risqués, une hausse des défauts de paiement, et la détérioration du modèle d’entreprise», a souligné un responsable de la SEC, Robert Khuzami, cité dans un communiqué. 

L’accord a été approuvé par un juge fédéral à Los Angeles, trois jours avant l’ouverture prévue du procès de M. Mozilo. 

Deux autres cadres dirigeants de Countrywide, le directeur d’exploitation et le directeur financier, vont payer respectivement 5,25 millions de dollars et 13 000 dollars d’amende. 

Countrywide Financial, racheté dans l’urgence par Bank of America en 2008, incarnait les pires dérives qui ont conduit à la crise des prêts hypothécaires à risques dits «subprime». La société avait vendu massivement des crédits à des ménages au profil financier très fragile, poussant à la faillite personnelle des millions d’Américains, qui ont perdu leur logement

M. Mozilo avait été évincé du groupe en janvier 2008.

source afp oct10

5 réponses »

Laisser un commentaire